Interview de J. Philip Zindel

La relation au coeur de l’hypnose

Interview de J. Philip Zindel Médecin spécialiste – psychiatrie et psychothérapie FMH en cabinet privé à Binningen (Suisse).

zindel-70A l’occasion de son séminaire qui se déroulera le 05 et 06 avril 2014 à l’IFH, J.Philip Zindel nous explique les enjeux de la relation en hypnose et la façon dont on peut travailler autour de cette question fondamentale. Il expose également sa conception de la prise en charge du trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité chez l’adulte (TDAH).

1/ Lors du séminaire que vous animerez, vous allez souligner l’importance du travail autour de la relation en hypnose et proposer des exercices à ce propos. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Qui pense « hypnose », pense presque instinctivement en termes d’ « état de conscience », de « suggestion », d’ « hypnotisabilité », de « techniques d’induction », de « stratégies » etc. Or, comme dans toute autre forme de psychothérapie, c’est bien l’aspect relationnel qui représente la pierre angulaire de l’efficacité thérapeutique de l’hypnose. Un aspect malheureusement trop rarement abordé.

La relation hypnotique va bien au-delà de ce que représente une relation thérapeutique classique. Elle présente des particularités précieuses et qui sont spécifiques à l’hypnose. Les termes autour desquels pivotent ces qualités sont « relation symbiotique abstinente» et «relation animale».

L’aspect « symbiose » met en parallèle les relations entre une personne en transe et son thérapeute avec celle entre une mère et son bébé. Dans les deux cas s’installe un jeu d’identification et de contre-identification qui s’insère dans une sorte d’état fusionnel commun. Cet aspect de l’hypnose ouvre de nombreux potentiels thérapeutiques, en particulier dans la thérapie avec des patients montrant des troubles sévères allant jusqu’à la psychose. Ce sont en fait mes travaux de recherche avec Gaetano Benedetti portant sur les possibilités d’introduction de l’hypnose dans les psychothérapies avec les patients schizophrènes qui ont révélé l’importance primordiale de l’aspect relationnel. Parfois, en particulier avec des patients gravement perturbés, c’est le travail de construction d’une relation hypnotique (symbiotique réparatrice) qui représente le pivot du travail thérapeutique. Une méthode développée sur cette base est la méthode de l’ « introjection active du thérapeute en hypnose ». Quelques exercices pratiques nous permettront de vivre cet aspect spécial de l’hypnose.

Nous nous pencherons aussi sur l’aspect « animal » (dans un sens quasi mesmérien du magnétisme « animal ») de la relation hypnotique et nous l’illustrerons par quelques parallélismes stupéfiants entre le travail de dressage avec les chevaux (en particulier le dressage en liberté) et le travail hypnotique avec des patients. Dans ce contexte nous visionnerons et discuterons des extraits d’une vidéo où Frédéric Pignon explique son abord éthologique du cheval. Là aussi nous expérimenterons (malheureusement sans chevaux…) un certain nombre de concepts de ce travail par quelques exercices très simples et ludiques.

2/ Egalement, vous aborderez la question de l’hyperactivité. L’hypnose constitue-t-elle une vraie réponse à ce trouble qui fait beaucoup parler de lui ?

Le « trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité », TDAH, (en vérité plutôt une condition neuropsychologique particulière qui peut engendrer des troubles psychiques ou psychosociaux) est un diagnostic biologique qui, depuis qu’il peut être révélé par des méthodes de neuroimaging même chez les adultes, fait en effet beaucoup parler de lui. Il se caractérise en particulier (outre certaines capacités particulières très précieuses) par des difficultés de concentration, d’organisation, de contrôle affectif et cognitif.

Les personnes affectées de ce type de difficultés se trouvent logiquement et quasiment instinctivement à la chasse d’une méthode non pharmacologique leur permettant de manière « magique » de trouver calme, sérénité et concentration… et voilà exactement ce que semble leur promettre l’hypnose. Bien sûr l’hypnose ne permet pas de corriger directement des dysfonctionnements du système dopaminergique et ne peut donc remplacer une pharmacothérapie si elle est nécessaire. Mais ce que le travail avec l’hypnose peut apporter à ces patients, se passe à différents niveaux :
1. On sait qu’à l’âge adulte, le TDAH ne se manifeste généralement plus sous sa forme originelle mais qu’il a tendance à se transformer en troubles dépressifs, anxieux, obsessionnels ou autres. Or ce type de « diagnostic » posé à l’âge adulte n’est souvent plus mis en relation avec un TDAH dans l’enfance. Dans le travail hypnotique, les patients présentant ces diagnostics adultes (et en particulier ceux qui s’avèrent résistants aux traitements standard) montrent souvent des comportements particuliers qui suggèrent l’existence d’un TDAH sous-jacent. Dans ces cas, l’hypnose permet donc de s’approcher du diagnostic correct pour pouvoir finalement le poser, afin que puisse s’installer un traitement adéquat, et ainsi elle entre en jeu comme un instrument diagnostique.
2. Au centre de l’accompagnement thérapeutique des patients souffrant de leur TDAH, ce sont leurs modes particuliers de fonctionnement du cerveau qu’il s’agit d’explorer aussi minutieusement que possible, dans toutes les subtilités de leurs comportements extérieurs et intérieurs. Ici aussi l’hypnose peut introduire des apports de grande valeur.
3. Les techniques d’induction pour découvrir les états de transe thérapeutiques ne peuvent souvent pas s’appuyer sur les suggestions classiques de détente, de calme etc. Elles doivent être cherchées avec le patient d’une manière extrêmement flexible et sont souvent basées sur une activité physique.

3/ Est-il juste de dire qu’une grande part de votre approche actuelle consiste à renforcer le Soi des patients? Aborderez-vous également cette dimension ?

Il peut paraître presque trivial de constater que plus le Moi d’une personne est fort, c’est-à-dire plus le Moi se trouve en contact constructif avec l’inconscient, mieux la personne est à même de résoudre elle-même ses problèmes d’une manière autonome. Or toute psychothérapie, dans son essence même, est un travail fourni par le patient lui-même, en particulier par son inconscient. La présence du thérapeute joue avant tout le rôle de cadre dans lequel peut se faire ce travail, un cadre sécurisant, une sorte de couveuse pour l’autonomie.
La dimension du renforcement du Moi prend donc une place de pivot thérapeutique dans tout traitement psychologique. L’hypnose peut y contribuer à deux niveaux : tout d’abord, rien que l’acte d’entrer en transe représente une mesure de renforcement du Moi implicite, car il représente un gain en contrôle. Sur un autre plan, l’hypnose permet de travailler de manière explicite et ciblée avec des techniques de renforcement du Moi.

Séminaire

La relation au coeur de l’hypnose / Hypnose et TDAH adulte

Hypnose et hyperactivitéJ. Philip Zindel, psychiatre
Sam. 05 avril 2014 (14h-18h)
et Dim. 06 avril 2014 (09h30-17h) – W8T

Tarifs | Dossier d’inscription | En savoir plus

 

Première mise en ligne  : 15 janvier 2014

 

Institut Français d'Hypnose

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