Portrait d’Hypnothérapeute
5 questions à… Isabelle Ignace
Isabelle Ignace est psychologue clinicienne, hypnothérapeute.
Elle intervient en tant que formatrice en hypnoanalgésie et en hypnothérapie à l’IFH.
Dans cette interview, elle témoigne de sa pratique de l’hypnose auprès des enfants et des adolescents.
Pouvez-vous présenter votre parcours et la façon dont vous avez découvert l’hypnose ?
Je suis psychologue et, dans le cadre de mon cursus de formation, le responsable du DESS m’avait proposé un stage qui incluait le fait de se former à l’hypnose. Je suis donc tombée dans la marmite hypnotique à ce moment et cela ne m’a plus quitté.
L’utilisation de l’hypnose s’est forgée en même temps que mon début de pratique de psychologue.
Au niveau de mon parcours professionnel, j’ai travaillé plusieurs années en consultation douleur pour enfant à l’hôpital ainsi qu’en libéral en tant que psychologue clinicienne auprès des enfants, des adolescents et des adultes.
Rapidement, j’ai par ailleurs commencé à donner des formations dans le domaine de la douleur, de l’hypnose en pédiatrie et de l’hypnose en général.
Aujourd’hui je partage donc mon temps entre mon activité en libéral et mon activité de formatrice dans le champ de l’hypnose.
Quelles sont les principales spécificités de l’hypnose chez l’enfant ?
L’enfant a tendance à garder les yeux plus souvent ouverts sous hypnose et peut aussi être beaucoup plus en mouvement que l’adulte. Il accède par ailleurs beaucoup plus rapidement à un état imaginaire parce qu’il a moins de barrières.
L’enfant est fascinant en hypnose, fascinant par sa capacité à trouver rapidement des solutions d’amélioration à l’aide de son imaginaire.
En revanche, il peut avoir tendance à plus vite revenir dans le soin notamment lors d’un geste invasif. Il part plus vite mais il revient plus vite aussi. Il faut donc qu’il soit accompagné par le praticien tout au long du soin pour se maintenir dans cet état d’évasion. L’adulte aura plus de mal à entrer en hypnose mais une fois qu’il en a compris l’intérêt, il n’a pas trop envie d’en revenir.
Vous avez travaillé dans un service d’urgences pédiatriques, de quelle façon l’hypnose trouve sa place dans un tel service ?
L’hypnose trouve sa place de plusieurs façons. Si on se situe au niveau des soignants, le fait que l’un d’entre eux accompagne l’enfant en hypnose permet aux autres professionnels d’être moins mobilisés pour calmer l’enfant ou le raisonner. Ils peuvent ainsi davantage se concentrer sur les soins. Tous les soignants peuvent donc y voir leur intérêt car cela leur permet potentiellement de gagner du temps et leur évite de devoir utiliser des techniques de contention. Mais, pour que cela fonctionne, il faut toutefois que l’équipe accepte de prendre deux minutes en début de soin pour ne pas en perdre peut être un quart d’heure au milieu. Les équipes ne sont pas toujours prêtes à entendre cela.
Si on se situe au niveau de l’enfant, il y trouve également son compte. Si c’est son premier soin, le fait de bien le vivre lui permettra de ne pas être traumatisé et les soins ultérieurs seront d’autant plus facilités. Si il a déjà reçu des soins qui se sont mal passés, cela lui permettra de constater que les choses peuvent se passer différemment et qu’il a lui aussi un pouvoir sur la situation, un pouvoir d’évasion qui lui permet de ne pas subir.
Aux urgences, il y a un stress véhiculé par la situation, le contexte, tout ce qu’il voit autour de lui : les soignants dans l’urgence, les parents stressés. Le fait de constater qu’avec son imaginaire il peut s’éloigner de cela, se dissocier pour accéder à un ailleurs imaginaire plus apaisant permet de dédramatiser.
Si on se situe au niveau des parents, ils sont souvent contents et rassurés de voir qu’on s’adresse à leur enfant dans une globalité et pas que comme « un doigt de porte » ou « un point de suture » ou « un bilan sanguin ». L’usage de l’hypnose et des jeux pendant le soin favorise cette prise en compte de l’enfant dans sa globalité.
Vous travaillez également avec un public adolescent, comment adaptez-vous votre pratique à cette tranche d’âge par exemple dans votre pratique libérale de psychologue ?
Lorsque je reçois des adolescents dans mon cabinet en libéral, cela répond généralement à la démarche de leurs parents. Eux ne sont pas forcément demandeurs et n’ont pas toujours envie de se livrer, de parler, par peur d’un jugement négatif ou par pudeur. Une façon de travailler avec eux est donc de leur proposer un travail avec l’hypnose, dans un monde virtuel dans lequel ils se sentent libres. Cette liberté leur permet de transformer des choses, de se ressourcer dans un jardin secret qu’ils ne sont pas tenus de partager ensuite si ils préfèrent le garder pour eux. Cela leur permet ainsi de travailler leurs problèmes sans passer obligatoirement par le récit.
Quelles sont les spécificités de la prise en charge de la douleur chez l’adolescent avec l’hypnose ?
Dans le cas de la prise en charge de la douleur chronique on leur transmettra facilement des techniques d’autohypnose avec lesquels ils sont souvent à l’aise.
Lors d’un geste douloureux, la différence vient surtout du regard de l’adulte.
L’adolescent se trouve à la frontière entre l’enfant et l’adulte, ce qui peut engendrer des réserves chez le soignant qui peut ne pas oser l’accompagner de la même façon que les enfants. L’adolescent a l’apparence physique de l’adulte mais encore une affectivité d’enfant donc il est tout aussi réceptif et ouvert à l’imaginaire, à un monde virtuel. Ainsi, c’est au soignant de faire abstraction de son physique presque adulte et de l’accompagner dans un imaginaire adapté à sa tranche d’âge, même si lui n’y connait rien (foot, jeux vidéo….).
Le portrait chinois de l’hypnose par Isabelle Ignace
Si l’hypnose était :
– Une œuvre d’art : La laitière de Johannes Vermeer
– Un personnage : Spiderman
– Un lieu : Parc d’attraction féérique
– Un objet : La montre de Braid
– Un animal : Un phoenix
– Un élément de la nature : Les flammes qui dansent dans un feu de cheminée
– Une musique : Grand corps malade
– Un souhait : Ce serait que tous les soignants sachent l’utiliser pour accompagner leurs patients autrement.
Première mise en ligne : 16/03/2017