Suite à la parution de son livre « Eloge de la souplesse », nous vous proposons une interview de Corinne Van Loey, psychologue et enseignante à l’IFH. Elle évoque son parcours, sa pratique en hypnothérapie et aborde l’importance de la souplesse comme principe de vie et d’évolution.
Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Psychologue clinicienne, diplômée de l’Ecole de Psychologues Praticiens de Paris (EPP), j’ai choisi de débuter ma carrière comme consultante RH en entreprise. Ce choix fut déterminé par ma difficulté à accepter les méthodes rigides et figées de la psychanalyse. En effet, la démarche aliénante du thérapeute alliée à une obligation de se soumettre à un calendrier précis – c’est-à-dire aux convenances du psychanalyste – était, et est encore aujourd’hui, à mes yeux aux antipodes d’une thérapie libératrice. Confrontée, dans ce contexte, à des hommes et femmes psychologiquement déstabilisés et traumatisés après leurs licenciements économiques dans une période de plein emploi, je trouvais que la réponse psychanalytique à leurs souffrances manquait de pertinence et d’efficacité. Le but étant qu’ils retrouvent la confiance nécessaire pour se réinsérer professionnellement. J’étais en désaccord sans avoir de solution, et c’est donc tout naturellement que j’ai recherché de nouveaux outils qui soient à la fois efficaces et avec lesquels je me sentais en harmonie. C’est ainsi qu’il y a vingt ans j’ai rencontré l’hypnose, et très vite, j’ai mis en relation la dissociation hypnotique avec la dissociation traumatique. J’ai entrepris diverses formations, un DU d’hypnose à Paris VI, puis un DU de victimologie à Paris V. Outre cela, j’ai parallèlement suivi une certification en EMDR avec David Servan Schreiber, m’a conduit à écrire un certain nombre d’ouvrages sur l’importance des microtraumatismes et sur l’apport fondamental de l’hypnose et de l’EMDR comme thérapies efficaces, qui loin d’enfermer le sujet dans un rapport d’aliénation va au contraire le libérer en lui permettant de remettre du mouvement dans une vie arrêtée par le ou les traumas. Aujourd’hui je consulte en libéral à Paris et enseigne dans diverses structures comme l’IFH, l’AFEHM, le DU d’hypnose de Paris VI, ou la faculté de chirurgie dentaire de Garancière.
Qu’est-ce que l’hypnose a changé dans votre pratique de psychologue ?
A l’instar de la psychanalyse, le thérapeute n’est plus seul le maître du jeu, mais simplement un « facilitateur » qui va permettre à son patient de découvrir sa boussole intérieure et ainsi de choisir le cap qui lui convient. Elle a donc pour finalité de permettre en toute liberté au patient, d’opérer les changements auxquels il aspire, par ses seules ressources.
Dans votre dernier ouvrage, vous abordez la place de la souplesse comme principe de vie, d’évolution. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? En quoi l’hypnose permet de faciliter le recours à cette souplesse ?
Les patients viennent nous demander de les aider à trouver les sources du changement, alors qu’ils sont paradoxalement arrêtés et en désir de tout comprendre avec une volonté exacerbée de vouloir tout contrôler. Cela se traduit par une rigidité et une difficulté à lâcher prise. L’hypnose se révèle alors être la puissance du roseau, celle qui nous aide à lutter contre les perturbations émotionnelles.
D’où l’importance capitale de la prise de conscience de ce qui est en notre pouvoir et ce qui nous est étranger, c’est-à-dire de ce qui dépend de nous et de ce qui ne dépend pas de nous. Force est alors de constater que seule la souplesse, principe de vie par essence peut nous ouvrir à nouveau sur le mouvement et le changement qui étaient restés figés par le trauma. Car l’hypnose est, selon moi, un art de vivre puisqu’elle permet de se réassocier à soi. En effet, lorsque le patient est présent à soi-même, le lâcher prise révèle sa vraie nature qui est d’être spontané et naturel.
Quel lien faites-vous entre cette notion de souplesse et l’objet de votre dernier ouvrage, la colère et la façon de la vivre dans sa vie ?
Une colère non exprimée et surtout n’ayant pas atteint sa cible racine favorise l’arrêt, la retenue, la crispation et en cela elle est majoritairement un frein à la vie et au mouvement et par extension, au lâcher prise et à la souplesse. C’est pourquoi il est nécessaire de la traiter dans le contexte où elle a pris naissance, puisque ce dernier est la source intrinsèquement libératrice et par conséquent l’ouverture retrouvée vers la souplesse et la vie.
Le portrait chinois de l’hypnose par Corinne Van Loey
– une ouvre d’art : un tableau impressionniste. Si l’on a le nez dessus il n’a aucun sens, c’est la distance qui va révéler ce qu’il est.
– un personnage : Geppeto
– un lieu : n’importe où, là où l’imaginaire peut s’exprimer
– un animal : un caméléon
– un élément de la nature : l’eau, elle offre tous les possibles (gelée, liquide, bref elle peut bouger…)
– une musique : « Ainsi parlait Zarathoustra » de Richard Strauss
« La musique a trop longtemps rêvé ; nous voulons devenir des rêveurs éveillés et conscients. » Friedrich Nietzsche
– un souhait : être présent à soi, à l’instant, au monde
Référence bibliographique
La reconquête de soi par l’hypnose et la méditation par Corinne Van Loey ,Editions Dangles (2015)
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