A propos de Cécile Cunin-Roy, Psychologue clinicienne, hypnothérapeute, instructrice MBSR
Quelques mots sur votre parcours professionnel et votre première rencontre avec l’hypnose
Après avoir fait une école de gestion et travaillé en entreprise à Londres et à Paris, j’ai repris mes études et ai commencé un cursus de Psychologie à l’Université Paris-VIII en 1996. Et c’est en 2002, alors que je cherchais un stage pour l’année du DESS, que j’ai eu la chance de rencontrer le Dr Chantal Wood à l’Unité d’Evaluation et de Traitement de la Douleur de l’hôpital Robert Debré. Elle a été la 1ère personne à me parler d’hypnose médicale. J’ai rapidement suivi la formation à l’IFH et cela a été le début, et est encore, une longue et joyeuse aventure.
Quelles sont les grandes indications de l’hypnose en psychothérapie pédiatrique ? Qu’apporte-elle à la pratique du psychologue clinicien ?
Je reçois en libéral des enfants et des adolescents qui souffrent de douleurs chroniques et/ou d’anxiété. Ce sont deux de mes spécialités mais l’hypnose a d’autres indications en psychothérapie telles que l’énurésie/l’encoprésie, les difficultés scolaires, le manque de confiance en soi, les tics, le bégaiement, les addictions, les phobies, les troubles alimentaires, etc.
L’hypnose est selon moi, une aide précieuse pour le psychologue clinicien car elle développe l’imagination et la créativité, deux éléments indispensables pour entrer dans le monde des enfants et les accompagner.
Elle sort du cadre asymétrique du « psy qui sait » et de « celui qui a un problème » en favorisant la rencontre entre deux personnes qui vont ensemble dans le lien de confiance, le jeu et la sincérité, coconstruire une autre réalité.
Le psychologue apprend également aux enfants et aux adolescents, des techniques d’autohypnose qu’ils pourront réutiliser dans leur vie, pour trouver leurs propres ressources intérieures et leur permettre de grandir. Un beau cadeau quand même !
Quelle place prend véritablement l’hypnose à l’hôpital pour les enfants ? Est-elle compatible avec la présence, voire l’implication des parents ?
Je forme des soignants à l’hypnose en pédiatrie depuis une dizaine d’années et l’on ne peut que se réjouir du développement de cette pratique dans tous les milieux hospitaliers (pédiatrie et adultes). Elle est une aide considérable pour les enfants et les adolescents qui peuvent s’extraire de ce qui est douloureux et angoissant en partant dans leur imaginaire ou également, en devenant acteur de ce qui se passe en eux pendant le soin.
Cette pratique est également précieuse pour les soignants qui développent avec l’hypnose, une plus grande créativité et une autre manière de communiquer et d’être en lien avec les enfants.
Quand plusieurs personnes sont formées au sein des services, elle devient alors partie intégrante du soin.
La pratique de l’hypnose est pour moi compatible avec la présence des parents à condition de définir ce que l’on entend par présence. Certains parents sont des alliés précieux qui participent aux soins tout en respectant la place de chacun (ex. le parent qui tient le masque, la main de son enfant, lui chante une chanson…). D’autres, en revanche, par leur présence anxiogène ou agressive, peuvent être très toxiques pour leur enfant et pour toute l’équipe soignante.
Tout l’art du soignant consiste à évaluer ce qui est le mieux pour l’enfant et à s’autoriser parfois à gentiment suggérer aux parents d’aller « prendre un café » pendant le soin.
Selon les habitudes des services, cela n’est pas toujours possible mais l’hypnose apprend à oser, dans le respect de l’enfant et de son propre travail.
L’hypnose avec les enfants est-elle similaire à l’hypnose avec les adultes ? pourquoi ?
Lorsqu’un adulte consulte un hypnothérapeute, c’est lui qui a fait le choix de cette prise en charge. Après divers échanges, il s’installe confortablement dans un fauteuil et la séance répondant à un déroulement précis, peut commencer.
L’enfant lui, est amené par ses parents et il arrive devant le thérapeute, parfois sans trop vraiment savoir pourquoi il est là.
On ne peut selon son âge, sa personnalité, son envie de jouer…, lui demander de rester assis les yeux fermés, dans l’immobilité.
Toute la spécificité de l’hypnose avec les enfants consiste à être dans une grande souplesse et une capacité d’adaptation, moment après moment. Tout est imprévisible, mouvant, ludique et vivant. L’enfant donne les règles du jeu et le thérapeute tout en gardant son objectif (ex. diminuer une peur…) suggère, se déplace dans l’espace, joue, invente des histoires, utilise son monde et ce qu’il aime…
Bien sûr, selon l’âge et les besoins des enfants et des adolescents, des exercices d’hypnose « classique » sont proposés mais c’est vraiment au fil de la séance que le thérapeute par son intuition, son observation et son écoute, s’ajuste avec ce qui vient.
Je dirai que l’approche de l’hypnose est la même que pour les adultes mais le travail avec les enfants demande beaucoup plus de flexibilité, de disponibilité et de réactivité.
La dernière fois que vous avez utilisé l’hypnose.
Aujourd’hui en consultation.
Etes vous un cordonnier mal chaussé ? Ou l’autohypnose fait-elle partie de vos paires de souliers ?
Je dirai que j’utilise l’autohypnose de manière volontaire pour faire face aux évènements pénibles (ex. prises de sang, environnement hostile…) et également de manière spontanée pour accompagner les patients en hypnose.
Les petits mots magiques « Installez-vous confortablement… » me mettent directement en transe hypnotique et sont comme la clé que l’on tourne pour allumer le moteur d’une voiture. Une petite étincelle et puis le voyage commence. L’inconscient est le GPS qui aide à guider le patient (et soi-même), sur le chemin de ses ressources intérieures.
Avec cette question, je prends conscience que je pourrai également utiliser plus activement l’autohypnose pour augmenter par exemple mes capacités de mémorisation, le niveau d’énergie et bien d’autres choses.
J’intègre cette suggestion pour maintenant ou plus tard…
Portrait chinois de l’hypnose…
Si l’hypnose était une ville ?
New York pour son énergie et son potentiel à créer et construire.
Si l’hypnose était un objet ?
Un couteau-suisse multifonctions pour la pratique de l’hypnose en milieu hospitalier et un aquarium en libéral.
Si l’hypnose était une citation ?
« Si la porte est fermée, entre par la fenêtre ».
Si l’hypnose était un dessin animé ?
« Kirikou et la sorcière ».
Si l’hypnose était une couleur ?
La couleur de l’arc-en-ciel.
Si l’hypnose était un plat ?
Un thali indien pour le voyage.
Cécile CUNIN-ROY dispense le séminaire “hypnose et pédiatrie”.
Elle anime également des cycles de formations brèves « Hypnose et soins hospitaliers » pédiatrie/adulte en établissement de santé pour l’Institut Français d’Hypnose
Merci à elle pour cet éclairage précis de l’application de l’hypnose après des enfants.